Les effets néfastes de l’accord de libre-échange avec le MERCOSUR sur l’agriculture ne se feront pas seulement sentir en Suisse, mais également dans les pays signataires : Brésil, Argentine, Uruguay et Paraguay. Luttons contre cet accord, pour des échanges respectueux des producteur·ices et de la souveraineté des peuples!
Agriculture suisse : concurrence déloyale et effets collatéraux cachés
Le Conseil fédéral présente les contingents négociés comme étant supportables pour l’agriculture locale du fait de leur volume modeste: inférieur à 2 % de la consommation totale ou correspondant aux importations actuelles. Mais dans les faits, le volume du contingent détaxé arrivera sur le marché suisse avec un prix encore plus bas qu’auparavant, augmentant la concurrence déloyale dont souffrent déjà de nombreux agriculteur·ices.
Exemples: 20 % des importations de viande de bœuf proviennent déjà de pays du Mercosur. Actuellement la viande bovine d’Uruguay ou Paraguay est taxée 85 ct/kg dans les limites du contingent (et CHF 7.58 / kg hors contingent) ; avec l’accord MERCOSUR 3’000 kg de bœuf et 1’000 kg de volailles seront importés sans taxes. Les distributeurs pourront les vendre à un prix encore plus dérisoire, eux qui n’hésitent pas à baisser leurs marges sur les produits bon marchés pour en faire des produits d’appel, tout en gardant des marges élevées sur la viande de qualité suisse.
Pour les vins, l’exemption de taxes sera appliquée à 1,5 Mios de litres par an en provenance du MERCOSUR. En terme de volume ce n’est qu’une goutte d’eau par rapport aux vins importés de nos voisins européens. Mais chaque nouvel accord de libre-échange rajoute des volumes de vin détaxé (déjà 1,5 Mios litres du Chili en 2023) et l’addition accentue la pression sur notre viticulture en crise. Tous ces vins à vils prix tirent tous les prix vers le bas, alors même que les coûts de production ne cessent d’augmenter pour les vigneron·nes suisses. Le marché suisse du vin est biaisé par cette concurrence déloyale, mais nos autorités aveuglées nous resservent leur théorie des vases communicants : il y aura davantage de vin argentin et moins de vin espagnol sur le marché, une concurrence entre importateurs en somme…
Bafouer les normes sociales et environnementales
Le problème le plus crucial se cache dans les standards et les normes de production différentes d’un pays à l’autre. Au Brésil, les volailles sont élevées de manière industrielle, avec des conditions de détention catastrophiques, faisiant fi du bien-être animal et très éloignées des standards suisses. De plus, pour nourrir ces millions de poulets et de bovins destinés à l’exportation, des hectares de terres de la forêt Amazonienne sont défrichés pour y cultiver des fourrages : soja, maïs, etc.
L’élevage du bœuf dans les pays du MERCOSUR ne répond pas non plus aux mêmes normes qu’en Suisse. L’élevage industriel à très large échelle soulève aussi des questions sanitaires et de traçabilité, notamment le suivi des animaux clonés et de leurs descendants, l’utilisation d’hormones et de stimulateurs de croissance interdits en Suisse, les fourrages OGM, etc.
Des contingent de fourrages (maïs, soja, tourteaux) sont également prévus dans les accords. En particulier 8’000 tonnes de maïs fourrager pourront provenir du Mercosur: actuellement ce maïs est importé en totalité d’Europe – cultivé selon des normes sanitaires et environnementales similaires aux normes suisses – alors que l’Argentine et le Brésil autorisent pour sa culture 178 substances actives, dont 92 interdites en UE à cause de leur nocivité sur la santé et l’environnement… Même si la faîtière suisse du fourrage pour animaux s’engage à ne pas en acheter, cela n’empêchera pas des éleveur·euses individuel·les de le faire, le marché étant «libre» et aucun contrôle prévu. In fine, le consommateur ne saura même pas qu’il s’expose à des substances dangereuses vu le peu de données de traçabilité sur les étiquettes des produits.
Effets délétères dans les pays du Mercosur
Les conséquences de ces accords ne toucheront pas seulement l’agriculture suisse, mais aussi les pays du MERCOSUR. Toujours plus de produits «exportables» signifie toujours plus d’agriculture industrielle, sous forme de monocultures gourmandes en pesticides et engrais entraînant :
• déforestation et perte de terres pour les cultures vivrières et dépossession des populations autochtones
• dégâts environnementaux massifs: usage intensif de pesticides, appauvrissement des sols, perte de biodiversité…
• dégâts sociaux : communautés autochtones expulsées, paysan·nes sans terre, exode rurale, esclavagisme des employé·es agricoles…
• impact sur la santé des travailleurs (pesticides, fongicides, etc) et des populations (pollutions, sources d’eau impropres à la consommation, toxicité dans le sol et l’air…)
Promesses durablement vides
Selon les autorités fédérales, l’accord avec le MERCOSUR contient «un chapitre complet sur le développement durable», ainsi qu’un accord complémentaire prévoyant «des engagements en matière de protection des forêts et de la biodiversité, ainsi qu’en termes d’agriculture durable». En outre, un dialogue entre les parties aurait déjà été entamé au sujet de la durabilité…
Chapitre, engagements et dialogue forts jolis sur le papier, mais qui resteront lettre morte si aucun mécanisme contraignant n’est mis en place: suivi des impacts, contrôles stricts à toutes les étapes de production et transformation, sanctions, etc.
De nombreuses décisions prises par les peuples sont bafouées, comme notamment l’Article 104a de la Constitution suisse, ou la Déclaration des Nations Unies sur les Droits des paysan·nes et des personnes travaillant dans les zones rurales, etc. La souveraineté populaire est piétinée par les multinationales grâce à ces accords.
NON à l’accord de libre-échange avec le MERCOSUR
Conformément à sa position vis-à-vis des accords de libre-échange, La Vrille s’oppose fermement à celui avec le MERCOSUR pour des raisons environnementales, de perte de souveraineté, d’impact sur l’agriculture, etc.
Il est indispensable de disposer d’accords régulant les échanges commerciaux entre pays. Mais ces accords doivent comprendre des mesures tarifaires afin de garantir une concurrence loyale, ainsi que des mesures non tarifaires pour assurer l’équivalence des conditions de production et des normes. Ces dernières sont essentielles, car elles définissent le cadre du respect de l’environnement, de la préservation des ressources, de la santé et des règles sociétales.
Un référendum sera probablement lancé contre l’accord avec le MERCOSUR.
________________
Sur le même sujet:
________________
Liens:
- Ces produits du Mercosur qui pourraient débarquer dans nos assiettes – RTSinfo 21.07.2025
- Viande importée: qu’est-ce que Migros nous vend réellement? – Lucie Fehlbaum – Blick 02.02.2025
- L’accord commercial MERCOSUR-UE et son impact sur les paysannes : Notes du Brésil – Via Campesina 21.02.2025
- Les organisations de paysan·nes et d’agriculteur·ices d’Europe et d’Amérique du Sud s’unissent contre l’accord de libre-échange UE-Mercosur – déclaration Via Campesina et Coordinadora Latinoamericana de Organizaciones del Campo 30.01.2023
- Pas de libre échange à n’importe quel prix – FRC 29.10.2018
- Libre-échange avec Mercosur: non-sens climatique – Isolda Agazzi – Alliance Sud 05.05.2021
- MERCOSUR Conclu le 02.07.2025, signature en attente – communiqué SECO