Accord MERCOSUR: souverainetés populaires bafouées

De nombreuses décisions prises par les populations pour le bien commun sont piétinées allègrement grâce aux accords de libre-échange. Des lois décidées démocratiquement sont bafouées, des normes sanitaires et environnementales sont méprisées, des savoir-faire disparaissent et les valeurs universelles sont foulées aux pieds par les multinationales qui seules profitent des accords de libre-échange – dont celui avec le MERCOSUR est un exemple patent.

Normes environnementales ignorées

L’impact de l’accord avec le MERCOSUR sur l’environnement et les ressources naturelles sera délétère [lire Un traité commercial qui menace notre planète]. Que ce soit à cause de législations lacunaires ou de contrôles défaillants ou laxistes, les pays du MERCOSUR appliquent des normes inférieures aux nôtres dans bien des domaines. Mais ce n’est pas le reflet de la volonté des populations: personne n’a le goût pervers de l’empoisonnement au Paraquat, ni ne pollue intentionnellement son environnement naturel. La majorité de ces différences de normes découle de l’énorme pression exercée par les multinationales, entre autres via les accords de libre-échange.

Mépris des normes sanitaires

L’agrobusiness n’a que faire de notre santé. Il cherche uniquement la maximisation des profits par la réduction des coûts. Les pratiques d’élevage et le manque de traçabilité dans les pays du MERCOSUR sont préoccupants. Par exemple, l’utilisation d’hormones de croissance dans l’élevage y est autorisée, alors qu’elle est interdite en Suisse. Au lieu d’exclure ces produits de l’accord, la seule réponse du Conseiller fédéral Guy Parmelin est que « La présence d’hormones devra être clairement indiquée. » Un pied de nez aux décisions prises démocratiquement et une piètre mesure s’agissant d’une question de santé publique.

Savoir-faire en péril

Tout ce que les société humaines ont construit au fil des siècles – en symbiose avec leur environnement et les ressources à disposition – est balayé par le néo-libéralisme. L’agro-business entraîne la déforestation à large échelle et la dépossession des communautés autochtones de leurs territoires. Les pratiques ancestrales de ces populations et leurs connaissances approfondies du vivant en font des gardiens de la biodiversité, mais leurs savoirs disparaissent avec eux. De plus, les paysan·nes qui pratiquent une agriculture traditionnelle vivrière, variée et adaptée aux sols et aux ressources hydriques, sont également expulsé·es de leurs terres ou poussés à la faillite par les prix trop bas de l’agroindustrie.

En Suisse aussi les accords de libre-échange appauvrissent la diversité sociétale et déchire les mailles du tissu social. Les petits paysans disparaissent, de nombreux métiers artisanaux n’existent plus ou ont perdu leur sens (exemple: un menuisier n’est plus qu’un poseur de fenêtres préfabriquées).

Pourtant, préserver les pratiques locales et les savoirs-faire ancestraux est fondamental, car seule la diversité amène des solutions, alors que l’uniformité tue l’innovation.

Pertes de ressources financières

Les taxes qui ne seront plus prélevées à la douane sur les produits du MERCOSUR représentent de grosses sommes d’argent en moins pour l’Etat. Rien que pour la viande environ CHF 25 Mios par an (5 Mios pour le bœuf et 20 Mios pour les volailles) et CHF 1 Mio pour le vin. Additionnées à toutes les taxes que les autres traités et accords de libre-échange ont effacées au fil des ans, ainsi qu’aux taxes sur les produits industriels abolies par la Confédération depuis le 1er janvier 2024, cela représente des sommes colossales soustraites aux budgets des Etats. Alors même qu’ils manquent cruellement de moyens pour régler la facture des coûts cachés du libre-échange: dégâts environnementaux et sociaux notamment (lire Libre-échange: des pertes financières durables).

Législations bafouées

Au niveau Suisse, l’Article 104a a été introduit dans la Constitution fédérale en 2017 en tant que contre-projet direct à l’initiative populaire « Pour la sécurité alimentaire ». Il stipule que la Confédération

« doit créer des conditions pour : […]
d. des relations commerciales transfrontalières qui contribuent au développement durable de l’agriculture et du secteur agroalimentaire;
e. une utilisation des denrées alimentaires qui préserve les ressources.

Le Conseil fédéral est tenu de mettre en œuvre cet article constitutionnel 104a. Au lieu de cela, il signe un accord de libre-échange avec le MERCOSUR ; un bel exemple du mépris des décisions prises démocratiquement par le peuple suisse.

Au niveau international, c’est la Déclaration des Nations Unies sur les Droits des paysan·nes et des personnes travaillant dans les zones rurales (UNDROP) qui est constamment violée par les accords de libre-échange. Comme le dit la Via Campesina: « Les intérêts des entreprises agroalimentaires ont été systématiquement placés avant ceux des petit·es producteur·ices alimentaires et des travailleur·euses agricoles. Le prix des aliments que nous produisons a été artificiellement déconnecté du coût de la production locale.Nous sommes mis en concurrence les un·es avec les autres, alors que nos conditions de production sont très différentes d’un pays à l’autre. »

Valeurs fondamentales foulées aux pieds

Droits des paysan·nes et des personnes travaillant dans les zones rurales, mais aussi Droits humains, Normes internationales du travail, Droit des peuples autochtones, etc… nombreuses sont les conventions internationales bafouées par les multinationales bénéficiant de ces accords de libre-échange. Dans le cas du MERCOSUR, la déforestation et l’agrobusiness entraînent l’expulsion de communautés autochtones et de petits paysans condamné·es à la pauvreté ou à des emplois informels précaires, voire même parfois à des emplois proches de l’esclavagisme …auprès de ces mêmes entreprises responsables de leur dépossession et de leur misère. En Argentine, les ouvriers agricoles chargés de l’épandage des pesticides sont victimes de graves problèmes de santé, maladies, décès par intoxication et les villageois·es habitant à proximité des champs sont également impactés dans leur santé (pollution de l’air, du sol et de l’eau ; recrudescence de cancers, etc.)

De plus, ces multinationales n’hésitent pas à user de menaces ou d’agressions allant même parfois jusqu’aux assassinats de leaders syndicaux et de défenseur·euses de l’environnement ou des droits humains. Le Brésil se classe parmi les champions en la matière avec 25 meurtres de défenseurs des droits de l’environnement entre 2012 et 2023.

Les entreprises ne sont quasiment jamais tenues pour responsables de leurs méfaits. En mai 2024, l’Union européenne s’est dotée d’une législation contraignante sur la responsabilité des multinationales. La Suisse est très en retard, mais récemment une deuxième initiative populaire « pour les multinationales responsables » a recueilli 2,5 fois plus de signatures que nécessaires en un temps record et a été déposée en mai 2025. La population suisse revotera donc sur ce sujet, à moins que les parlements n’accouchent d’un contre-projet satisfaisant. En attendant, l’accord avec le MERCOSUR n’amène aucune amélioration à ce sujet.

Annexes aux accords = promesses vides

En réponses aux craintes soulevées par les ONG et associations suisses et dans les pays du MERCOSUR, l’accord de libre-échange est accompagné par un « accord complémentaire prévoyant des engagements supplémentaires en matière de protection des forêts et de la biodiversité, ainsi qu’en termes d’agriculture durable. » Où bien sûr « engagements » ne signifiera pas obligations, aucun mécanisme contraignant n’étant prévu: ni études d’impact, ni contrôles, ni suivis, ni sanctions. Seules mesures préconisées en cas différend entre Etats sur des violations de ces engagements: un Etat pourra nommer une commission d’expert·es qui établira un rapport contenant des recommandations… (voir fiche d’information du SECO). Aucune sanction donc et aucun recours possible ni pour les victimes directes, ni pour les Etats lésés.

De belles promesses vides, donc, qui touchent à des valeurs fondamentales universellement reconnues, et dont le respect absolu devrait être à la base de tous les échanges commerciaux. L’accord avec le MERCOSUR ne respect en rien la volonté des populations, il encourage même de nombreuses violations des droits humains élémentaires et il doit donc être combattu.

NON à l’accord de libre-échange avec le MERCOSUR

Conformément à sa position vis-à-vis des accords de libre-échange, La Vrille s’oppose fermement à celui avec le MERCOSUR pour des raisons environnementales, de perte de souveraineté, d’impact sur l’agriculture, etc.

Il est indispensable de disposer d’accords régulant les échanges commerciaux entre pays. Mais ces accords doivent comprendre des mesures tarifaires afin de garantir une concurrence loyale, ainsi que des mesures non tarifaires pour assurer l’équivalence des conditions de production et des normes. Ces dernières sont essentielles, car elles définissent le cadre du respect de l’environnement, de la préservation des ressources, de la santé et des règles sociétales.

Un référendum sera probablement lancé contre l’accord avec le MERCOSUR.